L’imagerie médicale des shunts porto-systémiques


POINTS CLÉS

Les shunts portosystémiques (SPS) représentent une anomalie vasculaire où le flux sanguin contourne le foie, perturbant ainsi la détoxification et le métabolisme hépatique. Ces anomalies, congénitales ou acquises, sont une cause fréquente d’affection hépatique chez les chiens et, dans une moindre mesure, chez les chats. L’imagerie médicale joue un rôle crucial pour confirmer leur présence, préciser leur morphologie et leur localisation, et guider la stratégie thérapeutique.

Vue latérale de l’abdomen d’un chien atteint de shunt portosystémique congénital mettant en évidence une microhépatie et une néphromégalie bilatérale.
La radiographie
Les radiographies abdominales permettent d’identifier des signes indirects de SPS. Chez le chien, elles révèlent souvent une microhépatie (60 à 100 % des cas) et une néphromégalie bilatérale. De plus, des calculs peu ou pas radio-opaques peuvent être suspectés dans la vessie, l’urètre, les uretères ou les reins. Il s’agit le plus souvent de calculs de biurate d’ammonium associés à une coque de sels calciques ou de struvite.
Historiquement, la radiographie permettait de diagnostiquer les shunts portosystémiques par une technique d’angiographie, cependant, cette technique invasive nécessitant un cathétérisme vasculaire, est aujourd’hui abandonnée au profit de l’échographie abdominale et de l’angioscanner.
L’échographie abdominale
L’échographie abdominale est l’outil de choix pour la recherche de SPS, grâce à sa nature non invasive et à sa capacité à détecter des signes directs et indirects.
Les SPS intra-hépatiques se manifestent par un vaisseau ectopique de gros diamètre connecté à une branche porte intra-hépatique, et se terminant dans la veine cave caudale hépatique.
Les SPS extra-hépatiques congénitaux se présentent sous la forme d’un vaisseau ectopique émanant de la veine porte, associé à un flux turbulent dans la veine à la terminaison du shunt et un diamètre réduit de la veine porte au niveau du hile hépatique sont des signes évocateurs (rapport VP/Ao < 0,6).
Lors de shunt acquis, réseau de vaisseaux tortueux localisés préférentiellement dans la région du rein gauche est noté. Des signes d’hypertension portale (Vmax < 10 cm/s) associés à un épanchement péritonéal et/ou une congestion digestive, peuvent être observés. Une inversion du sens du flux dans la veine porte peut parfois être identifiée.
L’identification des shunts Intrahépatiques est facilitée par le parenchyme environnant et leur grand diamètre alors que les shunts extra-hépatiques peuvent être plus difficiles à visualiser, nécessitant parfois une sédation pour améliorer la qualité des images.
Toutefois, l’échographie reste dépendante de l’expertise de l’opérateur, ce qui peut limiter sa sensibilité pour certains types de SPS. Si le shunt n’est pas identifié en échographie lors de suspicion clinique, il ne peut être totalement exclu.

Coupe longitudinale d’un volumineux SPS intrahépatique se jetant dans la veine cave caudale hépatique chez un chien, visualisé au Doppler couleur.

Reconstruction 3D d’un SPS extra-hépatique porto-cave chez un chien en Angioscanner.
L’angioscanner
L’angioscanner constitue une modalité incontournable pour évaluer les SPS complexes ou planifier une chirurgie. Cet examen offre des images en trois dimensions des circulations artérielle, portale et veineuse systémique. Il permet :
- La localisation précise de l’origine et de la terminaison du shunt.
- La reconstruction du trajet du vaisseau ectopique pour évaluer la faisabilité chirurgicale.
- La mesure du diamètre du shunt à son insertion.
- L’évaluation des rameaux porte intra-hépatiques, essentielle pour écarter une contre-indication chirurgicale due à une hypoplasie ou une agénésie porte.
Les images obtenues durant la phase portale permettent une visualisation optimale des shunts.
En l’absence de shunt visible, l’exclusion d’une anomalie macroscopique conduit à envisager une dysplasie microvasculaire hépato-portale ou hypoplasie portale.
Scintigraphie : une option fonctionnelle
La scintigraphie transcolique avec le technetium-99m reste utile pour détecter les SPS. Elle met en évidence un flux sanguin contournant le foie grâce à l’utilisation d’un isotope. Cependant, cette technique présente des limites :
- Absence d’informations morphologiques sur le shunt.
- Incapacité à distinguer les SPS intra- et extrahépatiques.
- Exigence d’isolement post-procédure en raison de la radioactivité résiduelle.
Malgré ces restrictions, elle peut être employée pour confirmer un diagnostic présumé basé sur d’autres modalités.
L’imagerie médicale offre des outils précieux pour diagnostiquer les shunts portosystémiques et orienter leur prise en charge. Tandis que l’échographie reste une première étape abordable et accessible, l’angioscanner s’impose pour de nombreux cas complexes ou nécessutant une chirurgie. Une interprétation précise par le radiologue vétérinaire reste essentielle pour garantir un diagnostic optimal.